Jacques Sultana

Peintre
« Jacques était un paria. Malgré une adresse dans les beaux quartiers du 16e arrondissement, il vivait dans deux chambres en soupente qui lui servait d’appartement et d’atelier. Jeune homme chassé par sa famille en raison de son homosexualité, il trouva refuge dans ce nid d’aigle qu’il ne quitta jamais, une adresse convenue qui fut le dernier lien avec son éducation bourgeoise. De ce traumatisme familial il garda une certaine agressivité de peur d’être agressé, la moindre remarque sur un de ces tableaux pouvait le bouleverser et j’ai su plus tard qu’il reproduisait ce schéma de la rupture, même avec ses amis. Je découvris le travail de Jacques, lorsqu’un collectionneur sollicita mon expertise. Troublé par l’hyperréalisme de sa peinture, il craignait une supercherie technique proche de la photographie retouchée.
Essoufflé après l’ascension des sept étages, j’entrai dans l’univers du peintre : une accumulation de portraits d’hommes. Chaque mur en était recouvert, des piles s’accumulaient sur le sol moquetté de rouge. (…) » Pierre Passebon (extrait du livre Jacques Sultana, ed. Pierre Passebon, 2022) Jacques Sultana représente principalement de jeunes hommes seuls, le plus souvent nus, dans toute leur puissance érotique et sexuelle. S’il n’y a qu’un seul corps sur la toile, toutes ses peintures répondent à un regard extérieur
– celui du peintre d’abord, puis celui du regardeur – qui dirige la composition autant que l’attitude du modèle. Jacques Sultana annihile ainsi toute l’ambiguïté d’un jeu de cache-cache éculé entre exhibitionnisme et voyeurisme pour lui préférer la mise en scène d’une relation directe et frontale entre un corps nu pleinement offert et celui qui le détaille, qui le façonne pour sa propre jouissance. La question de la véracité physique est ici hors de propos(…). Car sa recherche semble se trouver ailleurs, dans cet instantané d’un corps qui se sait vu et d’une main qui le touche de son pinceau. (…) Bien sûr ces images conservent une forme de fascination charnelle, mais autre chose s’y glisse, le rayonnement solaire de la jeunesse y côtoie la mélancolie d’un paradis perdu. Jean-Pierre Blanc, Directeur général de la Villa Noailles à Hyères (extrait du livre Jacques Sultana, ed. Pierre Passebon, 2022)

Ses oeuvres

Exposition